La responsabilité sociétale de l’entreprise est un concept qui remonte aux années 1950. L’expression « corporate social responsability » ou « responsabilité sociale de l’entreprise » a été utilisée pour la première fois en 1953 par Bowen, le père fondateur de la RSE, dans son article intitulé « Social Responsabilities of the Businessman ».
L’évolution de la RSE
Son apparition remonte aux travaux pionniers de l’économiste Américain Clark (1916) qui proposa, dans son article « The Changing Basis of EconomicResponsability » d’intégrer la dimension sociale à la responsabilité économique des entreprises.
Mais, c’est le livre d’Howard Bowen, “Social Responsibilities of the Businessman” de1953, qui est reconnu comme l’un des travaux fondateurs sur la Responsabilité Sociale de l’Entreprise (RSE).Il est très fréquemment cité alors même qu’il semble avoir été très peu lu et analysé.
Daudée et Noel (2006) notent qu’à partir des années 1950, le concept a pris de l’ampleur et de nombreux chercheurs anglo-saxons se sont intéressés à cette thématique : Bowen (1950), Davis (1960), Walton (1967).
De même, dès 1932, suite au krach boursier de 1929 où la société a perdu confiance dans les entreprises, Berle et Means ont affirmé que « le contrôle des grandes entreprises devrait conduire à une technocratie neutre, équilibrant les intérêts des différents groupes de la communauté ».
Nous distinguons trois grandes phases de l’évolution conceptuelle de la RSE :
- Entre les années 1950 et 1960 : à cette époque-là, les efforts ont été orientés vers la définition du concept, de ses fondements éthiques et économiques, ainsi que la délimitation de ses frontières ;
- Au cours des années 1970 : durant cette période, les travaux de recherche sur la RSE ont pris une perspective pragmatique et managériale suite au développement des mouvements sociaux et environnementaux interrogeant l’entreprise ;
- Entre les années 1980-2000 : cette période était marquée par l’émergence d’un nouveau concept : la performance sociétale des entreprises (PSE) (ou ‘’Corporate Social Performance’’). Le concept de PSE représente alors un essai de synthèse des deux approches antérieures. Il met l’accent sur les capacités de gestion de la RSE, les retombées des politiques RSE et la mesure de ces retombées.
Définition de la RSE
Depuis, la RSE a fait l’objet de nombreuses tentatives de définition. Caroll (1999) a recensé plus qu’une vingtaine de définitions propres à ce concept. Toutefois, il reste encore peu univoque et consensuel, et aucune définition universelle n’a été donnée et acceptée.
La première définition de la RSE a été proposée par Bowen (1953) :
« …comme une série d’obligations entraînant une série de politiques, de décisions et de lignes de conduite compatibles avec les objectifs et les valeurs de la société ».
Aujourd’hui en pleine évolution, la RSE est encore en cours de définition influencée par le nombre important de nouveaux concepts connexes (Gond &Igalens, 2010).
À partir des années 1960, de nombreux économistes ont tenté de comprendre et de définir la RSE. Davis (1960) considère que :
« La responsabilité sociale de l’entreprise concerne les actions et les décisions que prennent les hommes d’affaires pour des raisons qui vont, en partie, au-delà des intérêts purement techniques et économiques de l’entreprise ».
À la même année, Frederick W. (1960) avance qu’« en dernière analyse, la responsabilité suppose une attitude civique à l’égard des ressources économiques et humaines, et une volonté d’utiliser ces ressources pour satisfaire des buts sociaux élevés et pas simplement l’intérêt étroitement circonscrit d’une personne privée ou d’une entreprise ».
Pour Carroll (1979), la RSE est « l’ensemble des obligations que l’entreprise a vis-à-vis de la société (en englobant) les catégories économiques, légales, éthiques et discrétionnaires ». Il propose un modèle tridimensionnel qui comprend quatre catégories de responsabilité : discrétionnaire, éthique, légale et économique.
Sur un autre registre, Walton (1967) développe le concept de responsabilité sociale à un niveau autre que celui des dirigeants : aux cadres et managers de l’entreprise. Selon lui, « Le concept de responsabilité sociale reconnaît l’intimité des relations entre l’entreprise et la société et affirme que ces relations doivent être présentes à l’esprit des top managers de l’entreprise ainsi qu’à l’esprit de ceux qui s’occupent des différents groupes auxquels elle est reliée et qui poursuivent leurs propres buts ».
En outre, des instances internationales et régionales se sont également intéressées à encadrer ce concept ; l’Organisation Internationale du Travail définit la RSE en ces termes : « la RSE traduit la façon dont les entreprises prennent en considération les effets de leurs activités sur la société et affirment leurs principes et leurs valeurs tant dans l’application de leurs méthodes et procédés internes que dans leurs relations avec d’autres acteurs. La RSE est une initiative volontaire dont les entreprises sont le moteur et se rapporte à des activités dont on considère qu’elles vont plus loin que le simple respect de la loi ».
Dans son Livre Vert, l’Union Européenne (2001) définit la RSE comme suit :
« C’est l’intégration volontaire des préoccupations sociales et environnementales des entreprises à leurs activités commerciales et à leurs relations avec les parties prenantes. Être socialement responsable signifie non seulement satisfaire pleinement aux obligations juridiques applicables, mais aussi aller au-delà et investir “davantage” dans le capital humain, l’environnement et les relations avec les parties prenantes ».
De son côté, l’ISO (International Organisation for Standardisation) s’est également penchée sur la définition de la RSE dans un document publié par le groupe de travail sur la Norme ISO 26000 sur la responsabilité sociale des entreprises. Dans ces lignes directrices, l’ISO donne la définition suivante :
« La responsabilité d’une organisation vis-à-vis des impacts de ses décisions et activités sur la société et sur l’environnement, se traduisant par un comportement éthique et transparent qui :
- Contribue au développement durable, y compris à la santé et au bien-être de la société ;
- Prend en compte les attentes des parties prenantes ;
- Respecte les lois en vigueur et qui est en accord avec les normes internationales de comportement ; et qui est intégré dans l’ensemble de l’organisation et mis en œuvre dans ses relations ».
Ainsi, dans toutes les définitions données de la RSE, le lien entre les dimensions économique, environnementale et sociale s’impose. Si l’économique s’articule autour de la création de richesses (profit), l’environnementale renvoie à la nécessaire compatibilité entre l’activité de l’entreprise et le maintien des écosystèmes (Planet), tandis que la dimension sociale ou sociétale s’intéresse aux conséquences sociales de l’activité de l’entreprise vis-à-vis de l’ensemble de ses parties prenantes (People). La RSE repose donc sur le principe du triple P (People, Planet and Profit) (Rodié, 2007, p.13).